Pour mémoire Trakt est un service en ligne qui permet de tracer les épisodes de séries (et accessoirement les films) que vous avez vu.
Néanmoins, à la différence des autres solutions du genre1Les français de BetaSeries et TVShow Time par exemple., marquer un épisode comme vu peut se faire de manière totalement automatique et transparente en utilisant un lecteur vidéo compatible (et il n’y a que l’embarras du choix quelle que soit votre platerforme de prédilection : Windows, Android, iOS…).
Parti pour rédiger un billet sur Engrenages1C’est donc partie remise pour l’excellente série de Canal+., je me suis retrouvé à écrire sur les séries policières et juridiques en général avant de déboucher sur les mutations en cours dans la consommation de séries…
Bref, désolé pour le caractère assez digressif de cet article :)
Qu’elle soit policière, juridique ou quelque part entres les deux, il existe deux grandes façons de construire une série judiciaire.
On peut s’appuyer sur un concept qui rythmera ses épisodes de manière quasi-immuable et qui tendra à les rendre indépendants les uns des autres ou au contraire construire une intrigue plus dense qui s’étalera sur plusieurs épisodes (idéalement une saison).
Kalinda Sharma (Archie Panjabi) et Alicia Florrick (Julianna Margulies) dans The Good Wife
La première catégorie a longtemps fait figure de norme mais semble un peu à bout de souffle aujourd’hui. Toutes ses représentantes ou presque injectent de plus en plus d’éléments feuilletonnants à leurs intrigues afin de donner au téléspectateur une raison supplémentaire de revenir épisode après épisode.
A mes yeux, actuellement, la plus grande réussite du genre est The Good Wife qui, bien qu’elle reste un procédural avec son affaire de la semaine (même si elle s’en dispense de plus en plus régulièrement ces derniers temps), parvient à développer une grande histoire depuis déjà six saisons. Sur un grand network avec plus de vingts épisodes à produire chaque saison, c’est tout de même une sacrée gageure !
Alors évidemment, la contre-partie de ce choix est que cela rend la série nettement moins accessible pour le téléspectateur occasionnel qu’une New York Police Judiciaire (Law & Order, qui – 25 ans après sa création – reste à mes yeux le maître étalon de la catégorie).
Chris Noth et Jerry Orbach à la grande époque de Law & Order / New York Police Judiciaire
Plutôt rare par le passé (je pense à Twin Peaks et Murder One2Deux séries qui après d’excellents démarrages se sont rapidement effondrées sur le plan des audiences.), l’alternative qui consiste à raconter une histoire se déroulant sur plusieurs épisodes s’est considérablement développée depuis une quinzaine d’années et ce, tout particulièrement sur les chaînes à péage qui peuvent plus facilement se permettre de perdre des téléspectateurs en cours de route si leurs séries restent encensées par la critique (on pense bien sûr à The Wire et à ses audiences anémiques sur HBO).
Plus récemment, une vague de thrillers européens a également donner un nouveau coup de fouet au genre (Forbrydelsen et son adaptation américaine The Killing; Bron et ses adaptations The Bridge et Tunnel; Broadchurch et son adaptation américaine et – bientôt – française; mais également Engrenages qui était précurseur de cette nouvelle vague dès 2005).
Le fait que la série judiciaire façon Law & Order ou Les Experts tende aujourd’hui à disparaître est à mon avis la conséquence de deux facteurs.
Tout d’abord, nous ne sommes plus dans les années 90 où, si vous aviez manqué un épisode, vous aviez bien peu de chance de pouvoir rattraper votre retard.
Aujourd’hui, entre les services de rattrapage des chaînes elles-mêmes, les services de streaming ou encore les sites de vidéos à la demande, il est de plus en plus simple de se mettre à jour.
Ensuite, j’ai le sentiment que la manière dont le grand public appréhende les séries a considérablement changé, au point que le téléspectateur moyen soit aujourd’hui bien plus prompt à s’engager sur une série que par le passé.
The Wire
Finalement, l’évolution de la série judiciaire illustre assez bien la période actuelle. La manière de consommer des séries est en pleine mutation, les services de Replay ont la côte et les services de vidéos à la demande sur abonnement (SVOD, tels que Canalplay ou Netflix) sont en pleine explosion.
L’offre n’a jamais été aussi riche et facile d’accès.
Dans ce contexte, les audiences des grands networks sont en berne car ceux-ci vivent toujours avec cette contrainte qui les oblige à réunir un maximum de téléspectateurs devant leur poste sur chaque case horaire3Un concept de case horaire qui, en dehors de grands événement ponctuels, est condamné tant il me semble évident que les enfants d’aujourd’hui n’y adhéreront jamais..
Par ailleurs, bien que cette pratique soit aujourd’hui utilisée avec plus de parcimonie, les annulations massives de programmes après seulement quelques semaines de diffusion que l’on a pu connaître par le passé ont beaucoup écorné l’image des networks auprès du public (et tout particulièrement auprès du public le plus susceptible de s’intéresser à des projets « différents »), ce qui tend mécaniquement à tirer leur production vers le plus petit dénominateur commun4Il y a bien sûr des exceptions mais le plus souvent celles-ci perdurent pour des raisons qui ont bien peu à voir avec les audiences (succès critique qui redore l’image de la chaîne, excellentes ventes à l’international…).
Les networks trouveront-ils des solutions pour nous offrir à nouveau des projets ambitieux ? Rien n’est moins sûr.
Espérons surtout que les services de SVOD (et accessoirement le piratage) ne siphonneront pas les abonnés des chaînes à péage afin que celles-ci conservent les moyens de produire toujours plus de bonnes séries.
S’il fallait compter sur les seuls services de SVOD pour produire des contenus de qualité, le monde des séries serait bien triste…
Le risque à moyen terme me semble réel car la mutation entamée n’en est qu’à ses balbutiement et les réponses annoncées par HBO notamment5La chaîne va enfin proposer une option d’abonnement 100% en ligne. risquent de ne pas être suffisantes pour convaincre le grand public car, même si le montant des abonnements peut se justifier, il va devenir de plus en plus difficile de convaincre le grand public d’accepter de payer 10 à 20$/€ pour chaque chaîne Premium lorsque les acteurs de la SVOD propose un catalogue pléthorique pour seulement 8,99$/€.
Pas sûr qu’il soit évident de faire comprendre au (télé)spectateur lambda que la qualité du catalogue futur des acteurs de la SVOD est directement conditionnée par la production des autres acteurs.
Sarah Lund (Sofie Gråbøl) dans Forbrydelsen
L’industrie audiovisuelle restera en crise tant qu’elle ne proposera pas une alternative globale au piratage.
Les services de SVOD sont un début de réponse mais ils ne peuvent en aucun cas rester la seule réponse.
En effet, en admettant qu’un Canalplay ou un Netflix soit en mesure de proposer une offre quasi-exhaustive dont la profondeur pourrait rivaliser avec ce que propose l’offre illégale, cela impliquerait que les chaînes qui produisent l’écrasante majorité des séries actuelles soient devenues obsolètes.
Si tel était le cas, la production viendrait immanquablement à se tarir.
Tout l’enjeu est donc de trouver une solution qui permette au public d’accéder simplement (et bien sûr légalement) à une offre riche et complète tout en garantissant la qualité et la diversité de la production.
Voilà une problématique d’une complexité abyssale. Le temps presse et les acteurs du secteur vont devoir y répondre de manière pertinente et efficace.
1
C’est donc partie remise pour l’excellente série de Canal+.
2
Deux séries qui après d’excellents démarrages se sont rapidement effondrées sur le plan des audiences.
3
Un concept de case horaire qui, en dehors de grands événement ponctuels, est condamné tant il me semble évident que les enfants d’aujourd’hui n’y adhéreront jamais.
4
Il y a bien sûr des exceptions mais le plus souvent celles-ci perdurent pour des raisons qui ont bien peu à voir avec les audiences (succès critique qui redore l’image de la chaîne, excellentes ventes à l’international…)
5
La chaîne va enfin proposer une option d’abonnement 100% en ligne.
Sick Beard est un logiciel assez extraordinaire qui offre aux fans de séries la possibilité de totalement lui déléguer la recherche, le téléchargement ainsi que le rangement des nouveaux épisodes de séries télé dans la foulée de leur diffusion.
Comment ça marche ?
Une fois installé sur votre ordinateur ou votre NAS (le logiciel est multi-plateforme), vous devrez indiquer à Sick Beard la méthode que vous souhaitez utiliser pour télécharger vos nouveaux épisodes, vous aurez le choix entre Usenet1Si vous choisissez Usenet (les fameux newsgroups), n’hésitez pas à vous tourner vers l’excellent client libre et gratuit SABnzbd. et BitTorrent.
Ensuite, vous indiquerez au logiciel quelles sont les séries que vous suivez et dans quelle qualité vous souhaitez les obtenir (SD, 720p, 1080p…).
Comme c’est devenu la coutume pour le géant américain du streaming, l’ensemble de la nouvelle saison de House of Cards a été mis en ligne d’un seul coup, c’était le 14 février dernier. Un procédé qui a du sens d’un point de vue stratégique puisque l’ambition de Netflix est clairement de venir chambouler les acteurs en place dans le monde des séries TV et sans doute plus particulièrement les chaînes payantes du câble telles que HBO ou Showtime.
Ce mode de diffusion réduit mécaniquement la durée de la couverture médiatique dont bénéficie la série mais Netflix s’en moque éperdument puisque, en tant que service de vidéo à la demande, celui-ci n’a pas de grille à construire et encore moins d’objectifs d’audience à atteindre sur des créneaux prédéterminés. Le principal objectif du groupe est de proposer du contenu exclusif à ses clients afin de leur donner une raison de plus de s’abonner (ou de le rester).
La disponibilité simultanée de la saison complète offre à chacun la possibilité de regarder la série exactement comme il le souhaite (en marathon dès le premier week-end ou en prenant son temps), ce qui est l’essence même du concept de vidéo à la demande.
Mieux encore, si la couverture médiatique est assez courte, elle est également plus intense, ce qui lui permet de résonner bien au-delà des seuls amateurs de séries.
Bref, sur le plan marketing, ce que fait Netflix est plutôt malin.
En revanche, en tant que téléspectateur, ce mode de diffusion est un peu frustrant car il diminue les échanges possibles entre amateurs (notamment sur les réseaux sociaux) puisque chacun regarde la série comme il le souhaite (ou comme il le peut) sans qu’aucun cadre ne soit donné par le diffuseur, ce qui augmente forcément la probabilité de se faire spoiler pour ceux qui prendront le temps (le risque ?) de regarder la série sur plusieurs semaines voire sur quelques mois.
Immanquablement, cela conduit beaucoup d’amateurs au binge watching avec en corolaire la nécessité de devoir attendre une année entière pour avoir accès à une nouvelle fournée d’épisodes (bon ok, on est vraiment en plein dans la catégorie first world problem ;).
Je suis peut être un peu old school mais, à mes yeux, la récurrence des rendez-vous hebdomadaires et l’attente (dans le sens positif du terme) sont les éléments clés qui définissent l’expérience séries TV.
Je ne suis pas en train de dire que le binge watching devrait être proscrit en toute circonstance – je ne suis d’ailleurs pas le dernier à y avoir recours – mais je vois plus cette pratique comme un moyen de rattraper son retard sur une série. A mon sens, il serait regrettable que cela devienne la norme.
Le président (Michael Gill) et son vice-président (Kevin Spacey)
Une histoire de format
Pour revenir au cas particulier de House of Cards et avant de s’intéresser au fond, je voudrais m’attarder quelques lignes sur un point purement technique qui m’irrite.
En effet, j’avoue avoir bien du mal à saisir le choix de ne pas cadrer la série en 16/9 (1.77) mais en 2.00, un format1Un récapitulatif des différents formats d’image traditionnels est disponible ici. plutôt atypique.
La différence reste relativement minime (de petites bandes noires en haut et en bas sur une TV 16/9) mais, étant donné que la série n’a absolument pas vocation à être largement diffusée en salle, ce choix fait assez peu de sens.
Autant je respecte le choix de certaines séries britanniques qui sont tournées en 2.35 (Utopia et In the Flesh notamment), car ce format apporte une vraie différence en matière de composition de l’image, autant franchement, du 2.00 en lieu et place du 16/9, c’est surtout prétentieux au possible (« On ne fait pas une série TV mais du Cinéma… Enfin à peu près »).
A mes yeux, ce format 2.00 est une aberration, une sorte de compromis à mi-chemin entre la Télévision et le Cinéma qui laisse penser que, lorsque David Fincher2Pour mémoire, David Fincher (Seven, Fight Club, The Social Network) avait réalisé les deux premiers épisodes de House of Cards l’année dernière. a défini l’identité visuelle de la série, le réalisateur souhaitait utiliser le format 2.35. Une idée que les exécutifs de Netflix lui auraient demandé de tempérer pour quelque chose d’un peu moins radical pour la télévision américaine (Tiens, Netflix ne serait finalement pas si aventureuse qu’elle aimerait nous le faire croire ?).
Que cette hypothèse soit la bonne ou non ne change rien. A l’arrivée, on se retrouve avec un format bâtard qui ne satisfait personne.
Et cette saison 2 dans tout ça ?
Pour commencer, bien qu’absents de l’essentiel du premier épisode de cette nouvelle saison, les moments durant lesquels Underwood (Kevin Spacey) s’adresse à la caméra pour nous expliquer quoi penser sont toujours aussi omniprésents que pénibles.
Alors oui, Underwood est un politicien et cette idée qu’il pourrait chercher à manipuler tout le monde jusqu’au téléspectateur est amusante mais, en pratique, ce gimmick à la subtilité pachydermique est complètement hors de propos, surtout dans dans une série dramatique qui se veut par ailleurs très haut de gamme.
De manière récurrente, tout boulimique de séries TV qui se respecte se trouve forcément confronté à une question quasi-existentielle au moment de reprendre une série laissée de côté durant quelques semaines ou mois :
Mais à quel épisode de cette série en étais-je ?!?
Aujourd’hui, beaucoup de petits éditeurs proposent des logiciels qui visent à nous aider dans pareille situation.
Les solutions ne manquent pas1Pour ma part, avant de découvrir Trakt, et même avant l’avènement des smartphones et autres tablettes, j’ai longtemps utilisé Next-episode.net, un site web qui permet de traquer ses séries et qui dispose aujourd’hui d’applications aussi bien sur Android que sur iPhone.
En 2011, je m’étais laissé séduire par la très jolie TVShow Time sur iPhone dont le manque de mises à jour a fini par avoir raison de mon enthousiasme pour ce projet français (la version iPad – pourtant payante – n’a jamais été mise à jour depuis son lancement en juillet 2012 et il avait fallu plusieurs mois pour bénéficier d’une mise à jour adaptée à l’écran de l’iPhone 5 l’année dernière). Edit 10/06/2014 : Accessoirement, les pratiques de l’équipe TVShow Time sont absolument lamentables, je vous invite à lire cet article édifiant sur le sujet. mais, malheureusement, la plupart exige que vous fassiez la démarche de leur indiquer tous les épisodes que vous regardez au fur et à mesure et, même si quelques-unes de ces solutions sont dotées d’une ergonomie plutôt bien pensée, cela reste malgré tout assez contraignant… surtout quand on peut faire autrement.
Et c’est là que Trakt intervient en poussant ce type de service un cran plus loin.
En effet, en s’ouvrant aux logiciels de lecture vidéo2En mettant à disposition des API (rendez-vous ici pour une définition tout à fait accessible de ce que sont les API). afin que ceux-ci puissent directement faire l’action de déclarer que vous venez de regarder tel ou tel épisode, Trakt propose de totalement automatiser une action que ses concurrents ne sont pas capables de gérer autrement que manuellement.
La beauté du service est donc qu’il est capable de fonctionner de manière transparente sans même que vous n’ayez besoin de vous en soucier.
Pour ma part, avant de découvrir Trakt, et même avant l’avènement des smartphones et autres tablettes, j’ai longtemps utilisé Next-episode.net, un site web qui permet de traquer ses séries et qui dispose aujourd’hui d’applications aussi bien sur Android que sur iPhone.
En 2011, je m’étais laissé séduire par la très jolie TVShow Time sur iPhone dont le manque de mises à jour a fini par avoir raison de mon enthousiasme pour ce projet français (la version iPad – pourtant payante – n’a jamais été mise à jour depuis son lancement en juillet 2012 et il avait fallu plusieurs mois pour bénéficier d’une mise à jour adaptée à l’écran de l’iPhone 5 l’année dernière). Edit 10/06/2014 : Accessoirement, les pratiques de l’équipe TVShow Time sont absolument lamentables, je vous invite à lire cet article édifiant sur le sujet.
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En mettant à disposition des API (rendez-vous ici pour une définition tout à fait accessible de ce que sont les API).